Résumé en français de l’article Students don’t know what’s best for their own learning de Arthur Poropat publié en ligne sur The Conversation
L’article de Arthur Poropat remet en cause un système aujourd’hui utilisé dans les universités : l’évaluation des cours et professeurs par leurs élèves.
S’appuyant sur deux études, la première à l’United States Air Force Academy et la seconde à la Bocconi University en Italie, il montre les dangers d’une trop grande confiance accordée au jugement des étudiants pour estimer la valeur de leurs enseignants.
L’évaluation des professeurs par les élèves est-elle un indicateur fiable de la qualité des enseignants ?
C’est, en tout cas, ce que semblent croire les universités qui se basent sur ces évaluations pour juger leurs professeurs et leurs cursus.
Mais Arthur Poropat met en doute le bien fondé de ce procédé. Pour cela, il présente deux études montrant que les évaluations données par les étudiants ne valorisent pas les professeurs qui les aident le plus à apprendre, bien au contraire.
Comment ces études concluent-elles que les élèves ne savent pas ce qui les aident à apprendre ?
A l’université, on peut raisonnablement évaluer la qualité d’un professeur à la future performance de ses élèves dans les classes plus avancées.
Pourtant, les deux études montrent que l’évaluation donnée à un professeur par ses élèves n’est pas corrélée avec leur réussite future, mais avec les notes que ce professeur leur a données dans son cours. En résumé, plus un professeur donne de bonnes notes, meilleure est son évaluation par les élèves, et inversement.
Or les élèves qui ont donné les meilleures notes à leur professeur ont eu de moins bons résultats que les autres dans la suite de leur étude. Cela veut dire que meilleure était l’évaluation d’un professeur par ses élèves, moins ces mêmes élèves ont réussi par la suite ! On imagine le problème que cela pose si les universités promeuvent uniquement les professeurs ayant les meilleures évaluations d’élèves.
Pourquoi les élèves confondent-ils bonnes notes et efficacité d’un cours ?
Arthur Poropat propose de se tourner vers la psychologie de l’éducation pour trouver à ce phénomène des explications basées sur les preuves.
Les recherches du psychologue Robert Bjork de UCLA ont montré que les étudiants jugent la qualité de leur apprentissage en fonction de la facilité avec laquelle ils accomplissent une tâche d’apprentissage. Ils confondent donc facilité de la tâche avec maîtrise du sujet. On comprend bien que cela puisse mener les élèves à mieux évaluer un cours qu’ils ont trouvé plus facile et dans lequel ils ont reçu de bonnes notes.
Quelles sont les autres conséquences de cette confusion entre facilité et apprentissage ?
En parallèle du biais introduit dans l’évaluation des professeurs, les élèves se trompent aussi sur les exercices qui les aident ou non à apprendre.
Les tâches difficiles qui demandent beaucoup d’effort, comme reformuler son cours ou s’auto-tester, diminuent l’estime qu’ont les élèves de leur propre compétence. A l’inverse, des tâches peu compliquées, comme relire ou surligner son cours, leur donne l’illusion de maîtriser le sujet. En conclusion, les tâches les plus utiles à l’apprentissage sont considérées comme les moins efficaces !
Dans le même esprit, les recherches de Carol Dweck ont montré que certains étudiants pensent la réussite plus influencée par l’intelligence que par les efforts fournis. Or les travaux de Arthur Poropat montrent que les efforts ont un effet plus grand que l’intelligence. Quand les élèves se reposent sur leur potentiel ou pensent que travailler plus ne les aidera pas, ils finissent par moins bien réussissent que les autres.
Quelles conclusions tirer de ces observations ?
Ces études montrent l’importance pour les étudiants de savoir différencier ce qui les aide vraiment à appendre et ce qui leur en donne seulement l’impression.
De plus, les universités utilisant l’évaluation des professeurs par les élèves doivent être conscientes que ces évaluations peuvent discréditer les cours les plus difficiles et efficaces, et encourager les professeurs à rendre leurs cours trop faciles.
Pour les professeurs, le challenge reste de maximiser l’apprentissage des élèves tout en maximisant leur motivation, c’est-à-dire de trouver le niveau juste de difficulté, pour enseigner le plus de connaissances possibles aux étudiants sans pour autant leur enlever l’envie d’apprendre.
Audrey Bedel